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Lili ou un journal à 4 mains
12 mai 2011

Il est passé par-ici

Tu imagines ? Toi, le spectateur imperturbable, le voyeur de ton propre monde, de ta propre vie, tu te décides un jour à regarder derrière la télé. Alors, au début tu flippes, bien sûr, parce que derrière la télé, tu vois vachement moins bien le gentil feuilleton qui te berce depuis que t'es réveillé. Forcément, même la pub te manque parce que t'es habitué à découvrir le dernier déo à la mode et la voiture que tu ne te paieras sans doute jamais.

Toujours est-il que lorsque la curiosité commence à te bouffer, que tu te demandes comment tout cela fonctionne, que le feuilleton commence à te faire chier, tu te lèves, tu vires les quelques miettes de chips sur ton jean et tu te décides enfin à lacher cette télécommande qui te donnes tellement de pouvoir, une illusion.

Tu te diriges vers la télé, tu fais deux pas, un regard derrière, on était pas si mal sur ce canapé, bien confortable, mais non, tu t'avances, tu te stoppes encore une fois, tu vois l'écran de près, les couleurs sont beaucoup moins belles, les pixels grossiers ... Et voilà que tu as fait le tour et que tu vois les câbles, tu commences à comprendre que la seule chose qui fait que cette petite boîte gueule toute la journée ne tiens qu'à un fil, c'est le cas de le dire ...

Alors tu le débranches, bien sûr, tu as hésité, est-ce que les jingles vont te manquer ? Aller, un peu de courage. Bruit caractéristique d'une télé qui s'éteind, t'as toujours l'impression qu'elle ne se rallumera plus jamais. Peu importe, c'est fait.

Tu écoutes, tu n'entends rien au départ, effrayant. Tu te concentres, tu cherches une speakrine, un chanteur de variet', une ancienne actrice porno reconvertie dans le consensuel ... Non, rien du tout. Tu commences à regretter, tu renonces à écouter.

Et là, alors que tes yeux et ta mains se dirigent vers le fil encore pendant, tu crois entendre quelque chose. Un son étrange que tu n'as jamais entendu, ou seulement lorsque tu pouvais encore te passer de cette boite à la con. Des oiseaux, le vent, les volets qui grincent, la plus sur le velux, les voisins qui s'engueulent, le frigo qui gargouille, les vélos dans la rue ... Et si tu te concentres très très fort, ton coeur qui bat !

Tu virvoltes ! Oh, une fenêtre, tu en avais presque oublié l'existence, la lumière te semblait tellement fade. Tu tires le rideau, et tu vois. Tu vois la vie telle qu'elle est, que les arbres se balancent, une femme qui se faufilent derrière les platanes, un enfant qui se casse la figure, le plus beau spectacle du monde.

Aujourd'hui je lève la main pour me cacher du soleil, je tiens serrer contre moi mon manteau pour éviter qu'il ne s'envole, je me secoue les cheveux trempés par la pluie. Je vis.

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